Roger Vilder

Algorithme tactile

 

Le travail de Roger Vilder est centré autour des concepts du mouvement et de temporalité dans toute son œuvre. Le mouvement implique pour lui, d’une part le changement, la mutation d’un état à un autre sur le plan physique, psychologique, individuel ou collectif, et d’autre part, l’évolution des formes dans leurs proportions, couleurs et textures.

Les premières recherches numériques de Roger Vilder datent de 1971. Elles aboutissent par des séquences d’animation. En 1973, il réalise une série de dessins par ordinateur au centre météorologique du Canada. De ces dessins, des sculptures sérielles et des œuvres graphiques sont réalisées.

En 2005, il a l’occasion d’animer le concept de ses dessins par des algorithmes dans lesquels il explore des compositions en noir et blanc et en couleurs sur écran dans un mouvement continu, aléatoire ou répétitif, rejoignant ainsi ses recherches cinétiques. Le mouvement constant des formes géométriques évoluant dans le temps reste la préoccupation principale du travail de Vilder.

En transposant ces algorithmes sur écran tactile, il permet au spectateur d’intervenir en agrandissant, diminuant, déplaçant ou fixant l’image. Se faisant, des compositions apparaissent sur la surface de l’écran, synthétisant par là, diverses recherches d’un grand nombre d’artistes du 20 ème siècle.

Lien vers la page de l’artiste

 

 

ARTICLE DES CHRONIQUES DU CHAPEAU NOIR : http://imago.blog.lemonde.fr/2016/10/27/roger-vilder-lart-en-partage/

TEXTE DE CLAUDE GUIBERT

Roger Vilder : l’art en partage

« Défense de ne pas toucher »

Dans les années soixante en France le G.R.A.V., Groupe de recherche d’arts visuels, édictait comme principes : « Défense de ne pas toucher » et  « Défense de ne pas participer ». Pour Roger Vilder qui expose actuellement à la galerie NMarino à Paris, ces injonctions retrouvent aujourd’hui toute leur valeur. Pour cet artiste qui a partagé sa vie entre le Canada et la France, les travaux sur l’art construit conjointement à ceux sur le mouvement le rapprochent de cette histoire écrite par les tenants de l’art cinétique. Car c’est un itinéraire d’une cinquantaine d’années qui aboutit aujourd’hui avec cette proposition d’ « Algorithme tactile ». Les premières recherches numériques de Roger Vilder remontent à 1971. En 1973 il réalise des dessins par ordinateur au centre météorologique du Canada.

Algorithme Roger Vilder

Désormais pour Roger Vilder cette volonté d’associer la création dans le domaine des arts plastiques avec la technologie informatique se concrétise avec ces dessins en noir et blanc ou en couleur animés par des algorithmes, les tableaux devenant en permanence modifiés par des mouvements aléatoires ou répétitifs. Le plan du tableau est alors asservi par l’ordinateur au bénéfice d’une œuvre en changement permanent.

« Algorithme tactile »

Le  « Défense de ne pas toucher » des artistes du G.R.A.V. trouve ici une nouvelle application avec l’utilisation par Roger Vilder d’écrans tactiles qui perturbent singulièrement le statut à la fois de l’œuvre et celui de l’artiste. Désormais, le collectionneur prend sa part de création pour chaque œuvre initiée par l’artiste. Le spectateur du tableau a pouvoir de décision en intervenant sur le plan tactile: il peut alors déplacer l’image, agrandir une forme, la réduire, modifier le rapport géométrique des formes et des couleurs.
Dans ces conditions, ce n’est pas seulement la nature de l’œuvre qui change en se voyant attribuer un acteur supplémentaire dans l’acte de création, c’est le statut même de l’artiste qui s’en trouve bouleversé. En mettant à la disposition du spectateur ce pouvoir de décision, Roger Vilder met en situation un tandem inédit qui, d’une certaine façon, désacralise le rôle du créateur, la prééminence incontestée de l’artiste. Imaginerait-on un tableau de Mondrian modifié au gré des humeurs du collectionneur ? Qu’en aurait pensé Mondrian lui-même ? Comment se définit alors la notion d’auteur ? Avec cette proposition  d’ « Algorithme tactile », Roger Vilder remet sur l’ouvrage la question du rapport à l’art que les artistes du G.R.A.V. posaient il y a un demi-siècle. Parmi ses membres, Julio Le Parc déclarait dès 1961 : «L’art d’ailleurs ne nous intéresse pas en tant que tel. Il est pour nous un moyen de procurer des sensations visuelles, un matériel mettant en valeur vos dons. Tout le monde est doué, tout le monde peut devenir partenaire. Et ce sera parfait si l’œuvre vous fait oublier le tableau, ‘l’œuvre d’art’».

« Défense de ne pas participer »

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Roger Vilder, avec ses « Algorithmes tactiles »installe ainsi cette relation nouvelle dans la création artistique. La mutation de l’œuvre d’art ne tient pas d’abord, me semble-t-il, à l’avancée technologique mais bien davantage à ce statut nouveau : le tableau au mur n’est pas un objet fini, définitif, il devient un élément interactif, modifiable, soumis à la volonté de son propriétaire, lui même détenteur de cette part de créativité. Le rêve des artistes du G.R.A.V. de voir naître une nouvelle relation entre l’artiste et le spectateur prend forme aujourd’hui  avec cet art du partage.

Article dans la Gazette Drouot du vendredi 21 oct 2016

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